Une nouvelle découverte révèle que la reine des abeilles peut activer son immunité à l’avance grâce à des signaux venus de la ruche.
Les abeilles sont bien plus que de simples insectes. Elles forment un organisme communautaire – une unité sociale complexe où chaque individu joue un rôle, mais où tous respirent à l’unisson. Cela a toujours fasciné les scientifiques. Mais une découverte récente dans le cadre du projet autrichien « Zukunft Biene » ouvre une toute nouvelle perspective.
En effet, la reine – figure centrale de toute colonie – possède le pouvoir de se « prémunir » contre les maladies avant même d’entrer en contact avec un agent pathogène.
Comment ?
Grâce aux ouvrières qui la nourrissent. Si ces abeilles ont été en contact avec des membres malades ou avec des pathogènes, elles modifient la composition chimique de leur cuticule – la couche protectrice de leur corps. Ces changements transmettent un signal à la reine : quelque chose ne va pas dans la ruche.
La reine réagit alors. Elle active son système immunitaire, même si elle n’est pas encore infectée. Ce phénomène n’a jamais été observé chez une autre espèce animale. Les scientifiques parlent d’un « signal immunitaire d’origine sociale » — la reine reçoit l’information par le toucher et l’odorat.
En laboratoire, ces réactions ont été confirmées à plusieurs reprises. Les reines ont montré une capacité à augmenter la production de cellules et de substances immunitaires – avant tout contact réel avec des bactéries. Mieux encore, cette aptitude semble renforcer la survie de la colonie en période de stress.
« Cette découverte est révolutionnaire. Elle prouve que les abeilles disposent d’une forme d’‘immunité collective’ qui fonctionne non seulement au niveau de la colonie, mais aussi à l’intérieur du corps de la reine », explique le professeur Karl Crailsheim, responsable du projet à Graz.
Les chercheurs pensent que cette faculté fait partie d’un mécanisme évolutif ayant permis aux abeilles de survivre pendant des millions d’années. Lorsque la maladie apparaît, la reine ne perd pas de temps. Elle se prépare. Et toute la colonie gagne en résilience.
Pour les apiculteurs, cette découverte pourrait s’avérer précieuse. Si les ouvrières envoient des signaux à la reine, cela signifie que l’état de santé de la ruche peut être détecté bien avant l’apparition des symptômes. Cela ouvre la voie à de nouvelles méthodes de diagnostic précoce, et à la sélection d’abeilles ayant une meilleure aptitude à réagir.
À une époque où les abeilles peinent à survivre à l’hiver, sont confrontées au stress, à la faim et aux pesticides – ce type de « communication interne » pourrait bien être la clé de leur avenir.
La reine n’est pas qu’un symbole de pouvoir. Elle est aussi une antenne. Un radar biologique. Une sentinelle immunitaire au cœur de la ruche.
